
Les systèmes dynamiques discrets sont des univers où le temps avance par sauts, non de manière continue.
À chaque instant, un état bien défini engendre le suivant selon une règle déterministe — une loi interne, souvent d’une simplicité déconcertante, mais capable de produire des comportements d’une complexité vertigineuse.
C’est ce que le projet Discrete Dynamic Lab explore :
un espace d’expérimentation où des réseaux booléens aléatoires, des automates cellulaires et le légendaire Game of Life de John Conway s’entremêlent pour révéler les bassins d’attraction de la matière computationnelle.
Chaque système dynamique, même le plus chaotique, possède des zones de stabilité :
des attracteurs.
Lorsqu’on lance la simulation à partir de différents états initiaux, certains chemins s’effondrent vers les mêmes cycles, les mêmes configurations répétitives.
Ces ensembles d’états, appelés bassins d’attraction, forment la cartographie du comportement global du système.
Visualiser ces bassins, c’est observer la topologie du destin d’un système.
On y distingue :
Introduit par Stuart Kauffman dans les années 1960, le Random Boolean Network (RBN) est un modèle abstrait de réseau génétique.
Chaque nœud prend une valeur binaire (0 ou 1) et met à jour son état selon une fonction booléenne dépendant d’un petit nombre de voisins.
La beauté du modèle réside dans sa régime critique — ce point d’équilibre entre ordre et désordre,
où le réseau cesse d’être figé mais ne devient pas encore aléatoire.
C’est à ce bord du chaos que la complexité émerge :
des motifs stables, oscillants, ou imprévisibles, semblables à des organismes computationnels.
Les automates cellulaires prolongent cette idée sur une grille.
Chaque cellule n’obéit qu’à ses voisines immédiates,
et pourtant, de ces interactions locales surgissent des structures globales.
Le plus célèbre de ces mondes est sans doute le Game of Life, conçu par John Conway en 1970.
Ici, chaque cellule est vivante (1) ou morte (0).
À chaque tour :
De ces trois règles simples émergent des phénomènes d’une richesse insoupçonnée :
des oscillateurs, des vaisseaux spatiaux, des canons à gliders.
Des motifs capables de se reproduire, de se déplacer, de transporter de l’information —
comme si la vie elle-même apparaissait dans une simulation mathématique.
Discrete Dynamic Lab n’est pas seulement une étude mathématique.
C’est une exploration artistique du comportement émergent.
Chaque réseau, chaque automate devient un laboratoire miniature
où l’on observe comment la complexité naît du simple,
comment les règles déterministes peuvent engendrer la diversité du vivant.
Ici, le code devient un écosystème,
les états, des organismes numériques,
et le système tout entier, une métaphore du monde réel —
où ordre et chaos coexistent, s’attirent, se repoussent,
et dessinent les formes subtiles de la vie computationnelle.